Une exposition au titre fort intriguant et au sujet ô combien large, voilà les idées qui me sont venues à l’esprit lorsque j’ai eu connaissance de la nouvelle exposition proposée par cette institution qu’est le Grand Palais à Paris (rien que le bâtiment, connu pour sa magnifique verrière, courrez le voir !).
Terriblement actuel, internet et plus largement, l’informatique, ont toujours été source d’angoisse depuis leur création avec cette question existentielle : les programmes informatiques dépasseront-ils un jour le cerveau humain ? Et quel meilleur domaine que l’art, domaine créatif par excellence, pour faire la comparaison ?
Sujet très riche donc, qui rendait cette exposition très attirante (enfin selon moi !), je m’y suis donc précipitée… Tour d’horizon.
1. L’homme et le robot : le commencement
L’exposition débute – immanquablement – par une brève rétrospective de la place des robots dans l’histoire de l’art. Dès les années 1950, les robots apparaissent dans la création contemporaine avec des artistes comme Tinguely ou encore Schöffer. Avec ces artistes, les robots prennent vie et remplacent la main de l’homme : les oeuvres créées par ces objets animés sont uniques et l’aspect de ces mêmes objets s’apparent farouchement au corps humain : le bras animé de Jean Tinguely, l’être humain créé par Nam June Paik…
Aujourd’hui, les robots s’émancipent et sont quasi autonomes. L’oeuvre se crée alors sous les yeux des visiteurs, en temps réel : le robot grapheur du duo Kanno et Yamaguchi s’active toutes les 10 minutes pour créer un graffiti grandeur nature ; les robots-peintres de Leonal Moura dessinent sur une toile de grand des oeuvres uniques impossible à déterminer à l’avance ; ou encore le robot animé pensé par l’artiste Sassolino, soit un grappin complètement articulé détaché de sa grue, qui évolue sur un sol en béton grâce à un algorithme relié à ses pinces – certainement le plus impressionnant.
2. Le robot numérique
L’exposition se poursuit avec l’apparition du numérique dans l’art. Les robots se font de plus en plus invisibles avec la précision de la technique. L’ordinateur devient la main de l’artiste, pouvant reproduire à l’infini la forme souhaitée par le créateur. Le temps de création est lui aussi touché par ces nouvelles technologies : aussitôt pensée, l’oeuvre est quasiment créée puisque l’ordinateur conçoit en temps réel.
Un des premiers usages de l’ordinateur dans la création fut dans le domaine musical à l’image de Mycenae Alpha de Iannis Xenakis, créateur de la musique électroacoustique. Plus récemment, l’oeuvre devient totalement numérique comme les fleurs gigantesques du jardin virtuel de Miguel Chevalier qui bougent au grès du passage des visiteurs (sublime !) ou la chorégraphie de la structure géométrique modulaire Grand HexaNet animée par un programme informatique d’Elias Crespin (hypnotisant !)
Ces oeuvres si autonomes interpellent au point de remettre en cause l’autorité de l’artiste qui délègue à la machine une partie de son pouvoir : l’artiste sait comment son oeuvre commence mais ne peut prédire quand et comment elle finira. Pour exemple, les imposantes colonnes en papier de l’artiste Michael Hansmeyer !
3. L’intelligence artificielle
Sujet constamment évoqué depuis plusieurs années, l’intelligence artificielle prend une place de plus en plus importante dans nos vies contemporaines toujours plus connectées : c’est le thème de cette troisième et dernière partie de l’exposition.
Aux discours alarmants qui annoncent l’hégémonie de cette intelligence artificielle sur l’intelligence humaine, les artistes et penseurs prennent le recul nécessaire et détournent cette I.A. au service de l’art. En recourant au « deep learning » (l’apprentissage sophistiqué des robots), les oeuvres de ces artistes – ORLAN, Murakami, Sharp – nous invitent à penser, à dédramatiser et même à rire de ces robots.
Ces oeuvres nous poussent ainsi à revoir la mesure de l’humain et à prendre conscience de nos limites, mais elles démontrent également que les robots sont seulement les co-auteurs de ces oeuvres, imaginées en commun avec l’artiste bien sûr mais aussi avec les spectateurs.
Visuellement et intellectuellement riches, l’exposition « Artistes & robots » mérite le détour. La quarantaine d’oeuvres présentée laisse libre cours à notre imagination et enchante par le champs des possibles qu’elle laisse entrevoir, contrebalançant les propos anxiogènes qui peuplent les actualités. Un vrai bol d’air frais !
Exposition à voir jusqu’au 09 juillet 2018
+ d’infos : Grand Palais
Excellent blog, si bien rédigé et avec de très bonnes photos.
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Merci beaucoup. Ravie qu’il vous plaise !
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